▬ La boule, va chercher à boire pour les chèvres allez, dépêche-toi, cela urge !
Roxana baissa du regard devant l'ordre que venait de lui donner sa soeur. Se faire nommer la boule était devenu une habitude pour elle. Depuis toute petite, ses soeurs avaient pris l'habitude de la surnommer ainsi, ou encore le gras, la laide. Elle en avait pris l'habitude et c'était toujours avec lassitude qu'elle allait puiser de l'eau au puit.
▬ Dépêche-toi, je te dis, espèce d'empotée.
Elles l'avaient toujours détestée. Elle la dénigrait. Ses soeurs avaient toujours été des beautés, depuis enfant, tandis que Roxana, elle, il lui fallu un temps avant d'acquérir une certaine beauté féminine. Elle avait de gros cheveux bouclés que sa mère peinait à démêler. Ils étaient tellement horrible à brosser, qu'elle avait fini par abandonner et laisser la jeune fille se débrouiller d'elle-même et un jour, en ayant marre, elle décida de se les couper court, au point de ressembler à une bonbonne masculine. Sa mère cria si fort que les voisins durent accourir pour voir ce qu'il se passait. Roxana avait neuf ans à l'époque et pour sa mère, il était inconcevable pour une fille de se couper les cheveux, encore plus quand ceux-ci étaient coupés si court qu'ils vous donnaient l'air d'être un garçon, plus qu'une fille. Plus tard, ils repoussèrent, mais cette fois-ci, ils devinrent lisse. Cependant, il lui fallu du temps avant de se débarasser de son embonpoint.
Elle se trouvait ridicule devant ses grandes soeurs, belles, grandes et sveltes, alors qu'elle présentait un visage ingrat au teint blafard et aux yeux trop foncés. Bref, elle n'était pas la beauté qu'aurait espéré sa chère mère. Pourtant, avec l'âge, elle se débrouilla pour s'affiner, prendre des formes plus féminines, malheureusement, sa mère n'était plus là pour voir le résultat. De voir sa fille devenir une vraie femme.

▬ Tu n'es bonne à rien !
▬ Tu ne feras jamais rien de tes deux mains !
C'est ainsi qu'elle apprit à grandir. Sous les représailles de tous le monde. Elle fut durant toute son enfance le vilain petit canard de toute une portée, la risée de toutes et de tous. Elle en a énormément souffert et pourtant, c'est grâce à tout cela qu'elle a réussi à grandir, à avancer dans la vie. Elle a toujours été très docile, à s'adapter à toutes situations et toutes personnes. Elle en a rencontré des gens, des bons, comme des mauvais. Le malheur de sa vie aura d'avoir été trop gentille avec les gens. Malgré la méchanceté de son entourage, elle a toujours tout fait pour leur venir en aide, même lorsqu'ils la rejetait. Avec le temps, elle a aussi apprit à ne plus faire confiance à n'importe qui, que quiconque te manquera de respect le paiera. Pas de sa vie, mais elle se chargerait de leur faire payer d'une manière ou d'une autre. Car même si elle peut paraître gentille, il faut toujours se méfier de Roxana. Car même si elle n'est pas très bonne aux fourneaux et à toutes ces autres tâches dont doivent se charger les femmes, c'est une très bonne main à tout faire, dans le sens où lorsque quelque chose ne fonctionne pas, elle trouvera toujours une solution pour le réparer. De plus, il lui arrivait souvent de garder les bêtes avec son père et elle a un très bon contact avec les animaux, même si, contrairement à beaucoup d'autres gens, elle ne mange pas de viande, car les animaux ont toujours été son unique réconfort lorsqu'elle se sentait seule et triste. Cependant, avec le temps, elle a apprit à se défendre lorsqu'on lui manquait de respect, car bien qu'étant une femme, elle n'est pas un objet et déteste les gens qui essayent de lui marcher sur les pieds. D'ailleurs, ceci lui a valu bien des problèmes avec les gens. Elle n'est ni soumise, ni marchandise.

   

▬ Roxana, viens ici ! Il faut que tu partes à présent !
C'est de cette façon que Roxana dut faire des adieux à ses parents. Son père la regarda à peine, préférant compter l'argent qu'il avait récolté en la vendant à un homme riche de la ville voisine. Sa mère quant à elle, la regardait, mais ne semblait pas ressentir une once de honte à la vente de son enfant, la plus jeune, elle avait treize ans et elle la regardait s'en aller sans bien même l'embrasser avant ou encore lui faire signe d'un au revoir. C'est ainsi qu'elle quitta le cocon familial. Enfin, cocon, ses parents avaient toujours été très durs envers elle. Elle n'a jamais été d'une grande beauté comme ses soeurs aînées, elle n'a jamais été l'objet de convoitise et comme ses parents se retrouvaient dans une situation difficile, vendre leur enfant était la seule solution. Ils ne pouvaient vendre les quelques animaux qu'ils leur restait ou bien ils ne pourraient plus se nourrir. Durant son enfance, ses soeurs ne s'occupèrent pas plus que ça d'elle, elles étaient bien trop occupées à se faire belle et une chose les motivait dans la vie, mettre leur soeur dans des situations indélicates et rigoler. Lorsqu'elle quitta la maison, elle éprouvait à la fois, le réconfort de ne plus vivre des brimades de ses soeurs, mais elle ressentait aussi de la peine, car elle savait que ses parents n'éprouveraient aucuns regrets à son départ. Au contraire, ils se délivraient d'un poids, de l'enfant laid et impotent. Quel pied, devaient-ils penser.

A peine arrivée dans sa nouvelle vie, on lui enseigna à domicile un minimum d'éducation, nécessaire pour faire d'elle une bonne épouse. Cependant, l'homme qui l'avait achetée, mourra quelques temps après son acquisition. Il fut pour elle comme un père par procuration. Il lui expliqua qu'il lui donnait cet enseignement sans arrières pensées, il savait qu'il était trop vieux pour épouser une aussi jeune fille. De plus, s'il l'avait acheté à ses parents, c'est qu'il leur avait rendu visite quelques temps auparavant et que la jeune fille qu'il vit semblait tellement malheureuse et ses parents étaient tellement en peine d'argent, qu'il décida de leur offrir cet argent en échange de la jeune fille. Et il ne fut pas étonné de les voir soulagé vis-à-vis de leur soulagement lorsqu'il l'embarqua avec lui. Cependant, après sa mort, il fut bien évident qu'elle devait vite retrouver foyer afin de ne se pas retrouver seule au monde et encore moins qu'elle se retrouve courtisane.
Heureusement pour elle, son premier mari avait tout prévu, il lui avait trouvé d'avance successeur, un homme chez qui se réfugier en l'échange de quelques pièces pour le bien-être de la jeune demoiselle. Malheureusement, cet homme n'était pas que de bonnes intentions. Déjà marié à deux femmes, elle dût d'abord traverser le pays pour rejoindre cet homme qui vivait alors en Turquie. Il était plutôt aisé, vivant dans une grande demeure au marbre blanc et sable, un véritable palais. Le "palais" comme elle aimait la nommer, était immense. Chacune de ses femmes avait sa suite, son bain et sa chambre, et même une petite pièce qui faisait office de penderie. Même si l'homme manquait de délicatesse envers ses femmes et Roxana, il leur offrai les plus magnifiques bijoux et vêtements qu'une femme pouvait rêver. Malheureusement, dût à son trop jeune âge, l'homme était d'abord réticent à a prendre pour femme. Après tout, pourquoi prendre une jeune fille tout juste sortie de l'enfance alors qu'il pouvait s'offrir toutes les plus belles femmes du pays. Pourtant, il la prit. Pendant deux ans, elle fut sa servante. Elle dut malgré tout apprendre à cuisiner, puis elle dut ensuite apprendre le turc. C'est à son quinzième anniversaire qu'il la prit officiellement comme femme. Elle détestait cette situation. Il était violent, vicieux et n'hésitait pas à l'insulter lorsqu'il le pouvait. Elle n'avait jamais le droit de quitter les lieux, ses sorties dans le jardin étaient programmées à l'avance par monsieur.
Un jour, en ayant marre de tout cet enfer, elle planifia son départ. Du haut de sa chambre, elle aperçut un matin des gens du voyage. Elle ne savait pas qui pouvaient être ces gens à l'époque, qui ils étaient, d'où ils venaient. Cependant, elle n'avait que d'autres choix que de s'enfuir ou bien elle finirait malheureuse à cuisiner pour un homme qui ne l'aime pas, qui est violent et la dénigre.

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