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 Un corbeau au service d'un paon ? (PV Monsieur)


Un corbeau au service d'un paon ? (PV Monsieur) EmptyJeu 19 Avr - 22:03

La fête était réellement magnifique. Comme d'habitude, tous les courtisans rivalisaient d'élégance et/ou d'ostentation, dans cette Cour jeune et flamboyante. La musique et les rires résonnaient dans la Grande Galerie du Château-Vieux, les talons claquaient sur le sol et les couleurs, quoique moins vives, tourbillonnaient avec gaieté. Ces festivités étaient vraiment réussies. On en oubliait presque le récent décès de la Reine-Mère, Anne d'Autriche. Ainsi en était-il à la Cour: la vie continuait et même ceux qui pleuraient l'ancienne Régente affichaient un sourire de convenance. Les masques, à la Cour du Roi-Soleil, n'étaient pas obligatoirement visibles.
Vêtu de noir de pied en cap, bien que la période réglementaire du deuil de sa femme ait prit fin depuis longtemps, Sébastien François de Ragny observait les réjouissances d'un oeil semi-amusé, tandis que de l'autre, il regardait Monsieur. Sa nouvelle charge de Gentilhomme de la Chambre lui imposait d'être toujours attentif au Duc d'Orléans, au cas où ce dernier ait besoin de lui. Même s'il devait bien avouer que toujours avoir un oeil sur Philippe était bien loin d'être désagréable.
En tant que fils d'un Frondeur embastillé pendant plusieurs années, recevoir cette charge avait beaucoup surpris le jeune homme, d'autant qu'il n'avait pas souvenance d'avoir fait quoi que ce soit pour la mériter. Mais bon, il n'était pas du genre à refuser un tel cadeau, et sa mère l'aurait très certainement renié s'il l'avait fait. Bon, peut-être pas renié, mais en tous cas bien réprimandé. Non pas qu'Elise de Ragny, née Elisa Durazzo, fût plus ambitieuse que son fils, mais, comme toute mère aimante, voir son seul enfant obtenir un tel honneur l'avait ravie au plus haut point. Par ailleurs, en apprenant la nouvelle, elle avait directement envoyé à son "gattino", comme elle aimait l'appeler, une splendide bague ornée d'une citrine, accompagnée d'une lettre où elle le félicitait à peu près toutes les deux lignes et où elle lui témoignait son bonheur de voir le blason des Ragny quelque peu redoré.

- Encore perdu dans vos pensées, Ragny ? dit une voix taquine tout près de lui.
Détournant son bleu regard des festivités et de Monsieur pour le poser sur le Marquis d'Effiat qui lui souriait avec une pointe de malice. Le jeune Gênois lui rendit son sourire, se passa une main dans ses cheveux sombres et doux que la plupart des gens admiraient ou lui enviaient.

- Décidément, on ne peut rien vous cacher, Marquis... répondit-il simplement, employant le même ton que son interlocuteur.
Mais la conversation n'eut pas le temps d'aller plus avant, car un geste du Frère Unique du Roi signifia à Sébastien que l'on avait besoin de lui. Après s'être excusé auprès d'Effiat, le nouveau Gentilhomme de la Chambre de Monsieur s'avança vers le Prince.
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Un corbeau au service d'un paon ? (PV Monsieur) EmptyVen 20 Avr - 19:33

    La douceur du chocolat se répandit le long de sa langue, glissa au fond de sa gorge. Il ferma les yeux et poussa un léger soupir de satisfaction, une satisfaction légèrement feinte, une satisfaction plus difficile à afficher qu'à son accoutumée. Pourtant Philippe d'Orléans était habitué à montrer une humeur qui n'était pas forcément la sienne. Depuis quelques semaines, depuis que la mort était venue cela lui était devenu bien plus ardu, proche de l'impossible. Il rouvrit les yeux et sourit au jeune garçon qui était face à lui et qui semblait attendre quelque chose de sa part. Dans un léger sourire il entrouvrit ses lèvres qu'il humecta du bout de sa langue rosée, et comme indécis resta dans cette position. Après un silence il regarda le jeune noble face à lui, et eut une moue espiègle.

    -Et bien... Je dois reconnaître que je ne m'attendais pas à une telle nouvelle.


    Fier d'avoir surpris le frère du roi, le garçon bomba le torse, lui fit un sourire charmant.

    -Personne n'en doutait plus Monseigneur, mais peut-être pas aussi rapidement.

    Affalé sur le canapé et allongé de tout son long, Monsieur pencha la tête en arrière et tendit son bras lourd de bijoux pour attraper son verre de vin.

    -Donc après avoir perdu ses trois épouses, dont on dit qu'il aurait désespéré la première, empoisonné la deuxième, et ensorcelé la dernière, notre Barbe-Bleue serait parvenu à trouver une quatrième victime? Et se marierait dans la semaine...

    Le verre de vin se leva jusqu'à ses lèvres boudeuses, sceptique.


    -Je plains cette pauvre femme... J'imagine que personne ne s'oppose au mariage?

    Le blondinet aux yeux de terre haussa les épaules d'un geste désinvolte.


    -Il est riche, ne demande pas de dot, les parents sont trop heureux d'offrir leur fille à si bon parti. Mise à part la jeune demoiselle elle-même, tous sont ravis.

    Philippe renifla d'un air méprisant et désabusé.

    -Ah ces femmes... La fortune leur est offerte sur un plateau et elles la refusent.

    Son regard fut attiré par un mouvement de lumière, il se rembrunit en voyant son épouse au bras d'une de ses amies disparaître dans le salon de Diane.


    -Et d'autres la saisissent partout où elle peut se présenter, ajouta-t-il, caustique.

    Il but une nouvelle fois dans son verre, se détourna pour regarder son compagnon.


    -Ne voudriez-vous pas sauver cette pauvre demoiselle? demanda le frère du roi l'air de rien.
    -Si cela plaît à Votre Altesse...
    -Je vois bien que tu le ferais à contrecœur,
    dit Philippe dans un rire.

    Même ce rire, aigu, féminin, tintait d'une certaine fausseté, d'une harmonie forcée, défaillante.


    -Ce pourrait être amusant, continua-t-il dans un sourire malicieux et rêveur, mais vous connaissant vous me mentiriez et je vous croirais, pouffa-t-il. Non il faut un autre sauveur, plus galant et chevaleresque que vous et en qui je pourrais croire.

    Le regard noir de Monsieur parcourut la Grande Galerie, alors qu'il claquait doucement sa langue sur son palais.


    -Voyons...

    Ses yeux se posèrent sur Effiat, son doux et serviable Antoine. Le jeune garçon regarda à son tour, sourit.


    -Monsieur le marquis vous adore et vous vénère Monsieur, mais vous seriez bien cruel de l'envoyer au secours d'une donzelle dont vous n'avez en réalité que faire.

    Philippe lui adressa un geste amusé pour le faire taire.


    -Chut mon cher, il me faut choisir avec justesse.

    Il plissa doucement les yeux en voyant qui se trouvait au côté du voluptueux Effiat. Son sourire s'élargit. Sa main se leva doucement, ses doigts s'agitèrent dans un tintement de bracelets. Il regarda le jeune homme à ses côtés alors que Sébastien de Ragny répondait à son appel et s'approchait d'eux.


    -Je suis certain que vous m'approuverez.

    Il releva ses yeux, son visage, son sourire vers Sébastien lorsque celui-ci arriva près de lui.


    -Marquis enfin! dit-il d'un ton enjoué bien trop exagéré pour être véritablement sincère, voudriez-vous me faire la grâce d'une faveur?

    Dans ses vêtements de deuil scintillants, dans son mauve obscur et ses rubans de noir, Philippe d'Orléans ouvrait son plumage de charme, d'espièglerie et l'offrait au sombre oiseau qui venait de les rejoindre avec une grâce certaine.


    -Il me faut une âme courageuse, brave et chevaleresque... J'ai pensé que vous conviendriez parfaitement. Ne me contredisez pas, ajouta-t-il précipitamment, j'en serai fort peiné.

    Le frère du roi avait fait une petite moue innocente et regardait le marquis qui s'accordait si parfaitement à la couleur des yeux princiers. Il termina sa dernière gorgée de vin attendant dans un sourire malicieux la réponse du jeune marquis, son regard ne pouvant se défaire d'une mélancolie qui le menaçait à tout instant et qui rôdait en lui depuis son récent retour à la cour. Depuis une semaine déjà... Il fallait se distraire, il le faisait, il n'avait pourtant pas le sentiment d'y parvenir. Monsieur se demandait s'il pourrait jamais se divertir innocemment à nouveau... Il traînait derrière lui le cadavre de sa mère et bon Dieu, comme il lui pesait! Il regarda Sébastien d'un air espiègle, penchant la tête sur le côté.


    -Et bien?



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À s'habiller sans péril, on triomphe sans goût
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Un corbeau au service d'un paon ? (PV Monsieur) EmptySam 21 Avr - 11:46

Tout en s'avançant vers Monsieur de son pas gracieux, le jeune marquis laissait son regard parcourir un peu la meute des courtisans, dont certains avaient aussi les yeux posés sur lui, soit par convoitise, soit par jalousie, soit par rancoeur. Il pouvait aisément deviner ce que pensaient ses ennemis et ceux (et celles) qui semblaient le désirer, et tout cela provoquait chez lui un certain amusement. Malgré son arrogance, il n'était pas vantard et ceux qui le taxaient de prétentieux étaient ceux qui se voyaient le plus à sa place, ceux chez qui l'ambition tenait lieu de loyauté. Car oui, l'Insaisissable plaçait la loyauté au-dessus de tout, malgré tout ce qu'on pouvait dire sur ses moeurs.
Son regard se posa sur un couple qui le fit sourire tendrement: son ami et ancien amant, Hector d'Alençon, comte du Perche, dansait avec son épouse, la belle Juliette d'Alençon, née Julietta Dioli, dont le ventre arrondi annonçait la future naissance d'un héritier pour Hector et d'un filleul pour Sébastien. Ils l'avaient décidé ensemble, Hector était le parrain d'Alexandra et Ragny serait celui de l'enfant à naître. Et le jeune marquis pria de toute la force de son âme pour que son cher Hector n'ait pas à endurer la même épreuve que lui. Un corbeau à la Cour était amplement suffisant et Sébastien en aurait le coeur encore plus déchiré.
Une fois à la hauteur de Monsieur, le jeune homme se pencha pour recevoir ses instructions. Obéir aux fantaisies de Monsieur lui était toujours une excellente distraction, même s'il se rendait bien compte que sa charge lui laisserait peu de moment de cette liberté qu'il chérissait tant.

Avec grand plaisir, Monsieur. répondit-il quand le Duc d'Orléans lui demanda s'il était enclin à lui faire grâce d'une faveur. Le portrait que vous me dépeignez me flatte beaucoup, Monseigneur, et je me ferai un devoir et un plaisir de vous satisfaire. Qu'attendez-vous de moi ?
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Un corbeau au service d'un paon ? (PV Monsieur) EmptySam 21 Avr - 13:43

    Philippe d'Orléans regardait d'un air amusé le jeune Sébastien de Ragny. Un homme intrigant que cet homme-là, un homme charmant, un homme désirable et bien évidemment Monsieur l'avait désiré assez rapidement. Effiat avait bien dégoté ce jeune garçon-là, comme toujours pensa Monsieur en retenant un gloussement. Oh Philippe ne l'avait pas rencontré immédiatement, il avait alors tant de choses à faire à l'époque, son esprit avait été si encombré. C'était le temps des trahisons et des désillusions, le temps terrible où Monsieur réalisait avec fracas que Guiche ne lui était plus entièrement acquis, où son épouse se l'était approprié. Un temps terrible de rage, de pleurs, de porcelaines brisées, de cris... Monsieur pensait alors à d'autres choses qu'à ces nouveaux courtisans, ravissants par ailleurs, qui rejoignaient la cour et ses fastes. Ou du moins Monsieur y avait pensé un peu moins qu'à son habitude... Non ce n'était pas vrai, ce fut aussi un temps de douceur et de caresses, Lorraine et Effiat y veillaient, et le frère du roi s'était bien retrouvé entre des bras aussi blancs que le lait et qu'il n'avait jamais rencontré. Bah, qu'importe que sa rencontre avec Ragny ne se soit pas faite plus tôt, qu'importe que ce ne fût pas les bras du sombre marquis.

    -Devoir et plaisir conjugués... Pour ma satisfaction? C'est merveilleux, dit-il d'une voix suave et amusée.

    Aussi étrange que cela puisse paraître, Monsieur n'avait rencontré Sébastien que par l'intermédiaire de son épouse, la douce Valérie, peut-être était-ce pour cela que la rencontre se fit plus longue, se fit attendre. Il avait apprécié Valérie de Mâcon malgré sa position de dame d'honneur et amie de Madame, sa femme, sa chère épouse. Monsieur avait éprouvé un pincement au cœur lorsqu'au détour d'une conversation Henriette lui avait annoncé le décès de la jeune femme. Quel dommage... Au moins l'enfant avait-il survécu, mais pour combien de temps? Le frère du roi pensa à Sébastien dont on disait qu'il était plus qu'épris de sa femme. Il était retourné à son jeu pour oublier ces pensées désagréables et dérangeantes qui tournaient autour de la mort et il avait bien fait, pour une fois le Duc d'Orléans avait gagné aux cartes. Il plissa les yeux dans un sourire, ce qui lui donnait un air d'espièglerie enfantine plus frappant encore.


    -Tout mon cher ami, j'attends tout de vous.

    Le frère du roi gloussa, et tendit son verre vide vers un valet qu'il ne regarda même pas. Il se cambra légèrement, arquant son dos, renversa sa tête, faisant tomber ses longues boucles noires, parfumées et enrubannées, pour atteindre une friandise qui se trouvait sur la table derrière lui. Plus, bien plus. Les gestes de Monsieur étaient bien plus forcés et exagérés. Il était effrayé que son malheur ne se vit dans ses mouvements qu'il pensait lents et dénués de vie, dans un flegme qui montrerait sa mélancolie. Et la mélancolie était déplacée, même si le deuil n'était pas encore achevé. Si Louis avait exigé son retour ce n'était pas pour qu'il assombrisse les soirées de la cour, ce n'était pas son rôle. Philippe aurait préféré briller par son absence, plutôt que de ternir par sa présence. Il avait été forcé. Et puisqu'il se devait d'obéir il essayait d'oublier. Ce ne devrait pas être si difficile pensa-t-il en regardant autour de lui, mises à part les couleurs légèrement plus obscures, rien ne laissait entendre que la Reine-mère était morte il y avait 20 jours de cela. Le roi faisait en sorte que ses invités soient satisfaits au-delà de leurs désirs. Tous riaient, buvaient, chantaient presque... Lui le premier. Fils indigne... Le désespoir était quelque chose de si étranger dans le caractère du prince, la nostalgie si dépareillée, que même s'il pouvait les éprouver ce n'était jamais éternel, ne le serait jamais, même s'il l'avait voulu. Philippe d'Orléans aimait bien trop vivre pour pleurer les morts, même les plus chers. Pour les oublier il vivait. Mais sa mère, sa mère était encore un poids, un poids qu'il chérissait et qu'il détestait tout à la fois.

    - Du grandiose et de l'épique! Du rêve et de la légende! Du sublime! Je veux tout à la fois. Vous me les donnerez n'est-ce pas?

    Sa voix féminine s'entendait sans peine dans le brouhaha de la Grande Galerie, sa voix chargée de teintes faussement innocentes, totalement gamines. Il avait souri, et s'était redressé tout en mordant dans le macaron qu'il venait de saisir. La charge de Sébastien n'était pas tombée par hasard, c'était un moyen assuré pour conserver à ses côtés cet oiseau qui volait de tous côtés, qu'on disait si épris de liberté. Alors l'air de rien, sur les bons conseils d'Antoine, Philippe avait nommé un autre Gentilhomme de sa chambre. Et même si le noir jurait étrangement dans le monde coloré de Philippe d'Orléans, la période de sombre et de deuil du moment lui permettait d'accepter cette petite fantaisie. Sébastien de Ragny valait bien quelques sacrifices.


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Un corbeau au service d'un paon ? (PV Monsieur) EmptySam 21 Avr - 15:31

Le Marquis de Ragny attendait patiemment à côté de Monsieur, un sourire doux et aimable aux lèvres. De tout temps, on lui avait vanté le charme de son visage, certaines mauvaises langues allant même jusqu'à ne lui accorder que ce mérite-là. La douceur de ses traits était certes l'un de ses atouts majeurs, mais il avait aussi un esprit très vif. Et c'était cela qui en faisait un tel séducteur. Son esprit donnait la profondeur à sa beauté.
Mais, sa vivacité comme son charme, aujourd'hui lui servaient de masque pour cacher sa souffrance, comme ils l'avaient fait, bien des années auparavant, à la mort de sa soeur. Cette nuit fatidique où il avait fui le spectacle d'Alexandra délirant à cause de la fièvre, cette nuit effroyable où, quand il était rentré chez lui, complètement ivre et débraillé, on lui avait annoncé, des larmes et des reproches plein la voix: "Alexandra vous a réclamé, jusque dans son dernier souffle..."
Cette phrase était restée gravée dans sa mémoire, si bien que quand le médecin lui avait annoncé que sa femme risquait de ne pas survivre à l'accouchement, il s'était précipité dans la chambre, malgré les conseils du docteur, et avait tenu la main de Valérie jusqu'à la fin.
À ce souvenir, Sébastien ferma un instant les yeux pour retenir les larmes qui menaçaient d'en couler, se força à endosser le rôle qu'il s'était créé, depuis son retour à la Cour, et écouta avec un sourire courtois la demande de Philippe. Il ne saisissait pas vraiment ce que le duc voulait de lui, mais il répondit avec toute l'élégance et la grâce qu'on lui connaissait:

Autant qu'il me sera possible de la faire, Monseigneur. Vous n'avez qu'à ordonner et le sombre oiseau que je suis vous obéira.
Certaines personnes rirent à sa dernière phrase qu'il avait accompagnée d'une gracieuse révérence dont il avait le secret. Son sourire était doux, ses gestes élégants et il savait manier le langage avec autant de grâce qu'il dansait. Bien qu'il fît la révérence, il ne put que remarquer les regards de jalousie ou de convoitise que certains courtisans tentaient maladroitement de dissimuler. Depuis qu'il était à la Cour, ces regards lui étaient devenus coutumiers et le faisaient plutôt sourire, à l'exception de celui que lui lançait le Duc de Puylaurens. Cet homme, qui avait été l'ami d'Etienne de Ragny durant la Fronde, désirait le jeune homme et ne jugeait pas utile de s'en cacher. Avant que Sébastien obtienne la charge qui était la sienne à présent, le duc ne le lâchait pas, durant les fêtes données à Saint-Germain, même à l'époque où Valérie était encore en vie. Et le marquis avait beau tenter de lui faire comprendre que même en rêve, jamais rien ne passerait entre eux, Puylaurens n'abandonnait pas.
Ce dernier avait le regard fixé sur le Gentilhomme de la Chambre de Monsieur, l'air contrarié au possible. Mais le jeune Italien essayait de ne pas lui prêter attention et restait concentré sur le Duc d'Orléans. Après tout, s'il l'ignorait, l'ancien ami d'Etienne de Ragny finirait certainement par le laisser en paix.
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Un corbeau au service d'un paon ? (PV Monsieur) EmptyDim 22 Avr - 22:48

    Le macaron fondit sous sa langue, répandit sa douceur sucrée et fruitée. C'était une touche exquise, délicieuse... Mais il manquait quelque chose. Il avait retenu une moue. Ce n'était pas ceux de la jeune Démieux. Comment en aurait-il été autrement? Comme s'il s'en était soudainement désintéressé, ce qui était le cas en vérité, Monsieur déposa le macaron sur le bord de la table, agita ses doigts bijoutés d'un mouvement précieux pour en faire tomber les miettes qui y étaient restées collées. Ce petit macaron resterait abandonné-là jusqu'à ce qu'il tombe au sol par mégarde, ou qu'il fût dévoré par un domestique en mal de nourriture. Quelle tristesse, il eut fallu que le pâtissier fut plus habile pour satisfaire les papilles déjà capricieuses de Philippe d'Orléans, et à présent devenues plus qu'exigeantes en la matière. Reportant son attention sur ce qui se passait autour de lui, le frère du roi jeta un petit coup d’œil à son compagnon qui observait et écoutait en silence l'échange avec Sébastien de Ragny. Il releva ensuite ses yeux noirs sur le jeune homme et lui sourit, se mit à rire doucement avec les autres convives, peut-être plus fort que le reste de l'assemblée.

    -Je suis donc le maître des oiseaux!
    fit-il en écartant les bras dans un sourire et en regardant les courtisans autour de lui qui gloussèrent une nouvelle fois. Nous sommes ce soir dans un véritable conte de fées.

    Il revint vers Sébastien qu'il regarda un nouvelle fois d'un air espiègle. On pouvait penser que le frère du roi avait un peu trop abusé du vin de champagne. C'était bien mal le connaître. Il s'était redressé et avait posé son bras le long du dossier du sofa, avait replié une jambe sous lui, ce qui dévoilait la splendeur de son pourpoint, le détail des broderies de ses étoffes et les scènes délicates qui se trouvaient peintes sur le talon rouge de ses chaussures. Philippe d'Orléans faisait mine de détailler le marquis qui se trouvait face à lui, dans un sourire condescendant et aimable. Il haussa les épaules d'un air négligent.


    -Il est vrai que votre plumage est aussi noir que la nuit... Et nous savons combien le noir peut m'être désagréable.

    Le jeune blondin qui se trouvait aux côtés de Philippe et qui n'avait pas détaché ses yeux de Sébastien depuis un long instant se tourna vers le Duc d'Orléans et dit d'une voix souriante et indulgente:


    -Mais c'est son obscurité qui nous permet de mieux discerner les étoiles.

    Philippe avait légèrement fermé les yeux et les rouvrit dans un large sourire, se redressant subitement, sautillant presque, tout en prenant un air dignement exagéré.

    -Soit ! J'accepte d'être votre maître, oiseau du soir, écoutez donc les ordres que je vais vous délivrer.

    Philippe entrouvrit les lèvres, se ravisa, sourit d'un air lutin en levant une main d'une élégance toute femme.

    - Mais tout d'abord votre serment de fidélité... Approchez bel oiseau, c'est une chose qui doit se perdre au creux de votre plumage, que je dois recueillir au sein de mes dentelles, venez. Et qu'aucun profane n'entende! Seulement moi.

    Le regard du frère du roi aurait, en d'autres circonstances, à une autre époque de sa vie, scintillé de mille feux. Ces feux n'étaient plus que l'ombre d'eux-mêmes, ce qui n'était néanmoins pas négligeable. L'âme de Monsieur n'avait pas changé, pas si profondément, et Monsieur désirait comme il avait toujours désiré auparavant.


Dernière édition par Monsieur le Lun 14 Mai - 17:18, édité 1 fois
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Un corbeau au service d'un paon ? (PV Monsieur) EmptyDim 29 Avr - 23:37

Etre au centre de l'attention, même d'un petit groupe... il avait été un temps où Sébastien raffolait de ça. Mais il savait aussi qu'être sur le devant de la scène était aussi très dangereux, parce qu'un seul faux pas pouvait s'avérer fatal. Mais le jeune Marquis de Ragny était bon danseur et savait faire passer un faux pas pour une belle acrobatie. De plus, il savait se retirer de la scène pour éviter de trébucher.
Cependant, là, c'était Monsieur qui menait le ballet et c'était un maître à danser particulièrement imprévisible qui aimait mettre les danseurs à rude épreuve. Et les spectateurs de cette danse élégante n'étaient guère plus charitables. Comme tout public, ils pouvaient vous célébrer un jour et vous abattre le lendemain, sans la moindre once de pitié. Telle était la dure loi de la Cour. Et Sébastien en était plus conscient que beaucoup de courtisans. Lui, le fils d'un Frondeur, d'un traître embastillé, mort en enfreignant la loi édictée par le fils aîné de la Sainte Eglise Catholique en personne, le Roi Louis XIV. Oui, il savait bien que sa grâce ne tenait qu'à un fil. Et ce fil, il ne l'ignorait pas, était aux mains de la Famille Royale.
La phrase du Duc d'orléans le fit rire en même temps que ceux qui l'entouraient. Le rire de Ragny avait habituellement la chaleur de l'Italie et la clarté de la mer Tyrrhénienne, mais, aujourd'hui ce rire semblait aussi superficiel que la feuille d'or qui recouvrait la cadre des tableaux des grands maîtres. Oh, bien sûr, seuls ses plus proches amis pouvaient s'en rendre compte, ceux qui connaissaient son véritable rire, qui avait enchanté les rues et les palais de la Splendide, qui avait tant séduit les jeunes gens qui l'avaient entendu, qu'aimaient tant Alexandra et Valérie, que sa mère se désespérait d'entendre à nouveau.
Le jeune veuf jeta un regard au beau garçon qui se trouvait aux côtés de Monsieur, un regard qui se fit très doux quand il prit sa défense, même si cela faisait partie du jeu du Frère du Roy. Le jeune blondin lui sourit et bientôt s'engagea un petit dialogue oculaire entre les deux courtisans, qui ne passa pas très inaperçu. En voyant le sourire moqueur d'Antoine d'Effiat, Ragny reporta immédiatement son attention sur Monsieur. Un serment de fidélité ? L'idée était amusante, quoiqu'elle l'éloignait un peu plus de sa liberté chérie. Attention, Sébastien, tu es sur le devant de la scène, joue ton rôle ou tu vas te faire descendre par les critiques.
Se penchant de manière élégante vers le prince, un sourire chaleureux aux lèvres, le Sombre Marquis, comme l'appelait certains courtisans, se mit à chuchoter, suavement:

Je ne suis qu'un corbeau,
Rien qu'un bien sombre oiseau.
Mais afin de vous plaire,
De bleu, d'ocre ou de vert
De toutes les couleurs
Pour vous, votre Grandeur,
Je me colorerai
Et je deviendrai geai,
Pinson ou rouge-gorge.
Grand-Maître des oiseaux
Ne prononcez qu'un mot
Et je tue le corbeau.
Bien que marquée de quelques hésitations, cette tirade procura une certaine fierté au jeune homme qui se redressa avec un sourire, attendant la réaction de son seul et unique auditeur.
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Un corbeau au service d'un paon ? (PV Monsieur) EmptyJeu 3 Mai - 14:04

    Quoi que puisse lui glisser sa souffrance récente, quoi que puisse lui faire regretter ses douleurs présentes, quoi qu'il puisse vouloir changer, Philippe d'Orléans ne vivait plus que par la cour, n'avait jamais vécu que par elle. Il était dans son élément et après 20 jours d'exil la retrouvait avec un délice qu'il ne contenait que par la honte d'en oublier la mort de sa mère. Observer ce ballet, ces danseurs s'élever vers les cieux et retomber aussi rapidement qu'ils étaient montés, cela l'avait toujours profondément fasciné. Il n'était pas un danseur lui, jamais il ne pourrait tomber pensait-il. Mais comme il aimait voir chuter ou mieux encore comme il aimait voir une envolée. Oh oui, il n'y avait rien de plus plaisant qu'une superbe envolée. Et l'espace d'un instant, d'un éclair la foudre illuminait le talentueux avant de l'abattre subitement ou de le laisser lentement suivre sa lente et douloureuse descente. Combien y avait-il eu d'Icare? Combien de Phaëton? Nul besoin de se plonger dans les mythes antiques pour faire revivre ces figures d'un autre âge, elles vivaient sous ses yeux, et lui Philippe d'Orléans pouvait provoquer une chute d'un croche-patte innocent, ou élever d'une caresse vers le firmament. Ses yeux noirs se perdirent dans le plumage du beau corbeau qui lui faisait face. Monsieur savait que Ragny était un joueur sûr, émérite, et quelque part il attendait peut-être un faux pas pour voir s'il n'y avait pas dans ce corps autre chose que du talent. Les aîles noires se penchèrent autour de lui et dans un sourire, jouant des cheveux du marquis qui lui venaient sous les doigts, il l'écouta avec attention.
    Des vers, des alexandrins, poésie noble par excellence, Sébastien choisissait ses armes avec attention. Ayant baissé les yeux dans une attitude candide, Philippe les releva doucement vers lui, gloussa. Colorer de nouveau le beau Sébastien, comme ce serait plaisant. Il fut un temps où le marquis avait arboré des couleurs chatoyantes inspirées de la belle Italie; sa femme mourut, son époux fut plongé dans les boues du Styx et ne semblait pas les avoir ôtées depuis. Monsieur retenait des frissons que soulevaient en lui les chuchotements doux et sucrés de l'oiseau. Pas de croassement, mais une brise qui le charmait. Par-dessus l'épaule de Sébastien, Monsieur vit enfin Puylaurens. Il ne l'avait jamais supporté, trop de rumeurs infâmes traînaient sur son compte et il le trouvait d'une saleté écœurante. Le regard de jalousie et d'envie qu'il put lire au travers du plumage de l'oiseau le fit sourire davantage. Le jeu devenait intéressant. Lorsque Sébastien termina son serment, se redressa, Philippe resta silencieux un moment, relevant le regard vers lui, et offrit un sourire de charme comblé. Monsieur eut une idée. Il écarta ses les lèvres pour répondre d'un ton nonchalant et malicieux :


    -C'est... ravissant.

    Il le regarda un moment encore avant d'ajouter lentement :

    Et cela mérite une réponse doux Ragny,
    Car que m'importe pinson, rouge-gorge ou geai,
    Si la vérité est trompée par leurs attraits.
    Même à la mort d'un corbeau le rouge jaillit,
    Et je ne me résoudrai d'un trait si mortel
    De couleur vous teinter et me rendre criminel.
    Aussi Corbeau tel que vous êtes restez,
    Je le veux, l'exige en toute... simplicité.

    Le frère du Roi s'était levé tout en délivrant ses propres vers cousus sur le vif, sans doute moins élégants que ceux qui les avaient précédés mais tout aussi voluptueux dans leur prononciation, la seule différence était que Monsieur avait adressé cette amusette à Sébastien, à Effiat, au blondinet, à Puylaurens bref... à tous ceux qui se trouvaient suffisamment proches pour l'entendre. Ayant souri sur l'ironie du dernier mot, il leva sa main bijoutée vers la joue du jeune corbeau, la caressa avec douceur, puis Philippe d'Orléans posa ses lèvres sur celles du jeune marquis, sans attendre une permission, sans la demander, sans même s'en soucier. Il ne forçait à rien voyons, jamais, étant convaincu qu'autrui se rendait toujours de bonne grâce à ses assauts. Monsieur profita de ces lèvres... Un peu, rien qu'un peu.
    Il mit fin au baiser, se recula et se mit à rire.


    -Voilà le baiser de votre seigneur et maître, je vous accepte comme vassal bel oiseau, susurra-t-il d'un ton enjoué et tentateur. Quel dommage que mon frère ne fasse plus cas de cette pratique, je la trouve charmante.

    Il s'était retourné dans une pirouette en lançant cela à la cantonade et avait pris un verre dans un geste précieux et amusé, avant de regarder autour de lui les effets de son "innocente" petite idée.


Dernière édition par Monsieur le Lun 14 Mai - 17:18, édité 2 fois
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À s'habiller sans péril, on triomphe sans goût
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Un corbeau au service d'un paon ? (PV Monsieur) EmptyDim 6 Mai - 21:48

La vie était vraiment différente depuis qu'il avait quitté l'Italie. À Gênes, il avait toujours l'impression d'être un prince, quelqu'un de vraiment important. On lui avait tout passé, tout donné parce qu'il était le neveu du doge de Gênes et que sa famille était très puissante. Il lui avait suffi de prononcer le nom de "Durazzo" pour que certains tenanciers de taverne ne lui réclamment pas l'argent qu'il leur devait, quand il en devait. Et quelques fois, ce nom l'avait aidé à séduire des "proies" vénales ou/et ambitieuses. Mais, à la Cour du Roi-Soleil, il n'était rien de plus qu'un danseur habile, qu'un comédien masqué parmi tant d'autres. Et tout ce que le nom que son père lui avait transmis pouvait lui apporter, c'était la méfiance du Roi et les moqueries des courtisans. Mais, même si son père s'était brûlé les ailes à provoquer le courroux du Soleil, Sébastien préférait être dans la lumière que dans l'ombre. La Cour était un noeud de vipères pour ceux qui ne possédaient pas le talent nécessaire, et une corde de funambule pour ceux, comme le jeune marquis, dont la famille portait le signe de la trahison d'un de ses membres. Sébastien avait toujours l'impression qu'on gardait un oeuil sur lui, que l'ombre de son père obscurcissait toujours ses pas, où qu'il aille en France. En Italie, le nom de sa mère l'éclairait, au contraire. Pourtant, il préférait largement le Soleil français et sa Cour. Il saurait racheter la conduite d'Etienne de Ragny, il en était persuadé. Il était né un soir de tempête, parmi les cris du vent. Et le vent savait fort bien chasser les nuages, mêmes les plus denses.
Son poème, composé sur le moment, avait apparemment fait mouche et Monsieur lui répondit à voix dans le même style. Toutes les personnes présentes autour du Frère du Roi applaudirent à la fin de la tirade. Sébastien compris. Les vers répondaient aux vers, comme cela devait être. Le Sombre Marquis ne prétendait pas être un grand poète ou quoi que ce soit dans le même registre - il laissait volontiers cela à Molière, Corneille et Racine-, mais il aimait les beaux mots et leur harmonie. Et on lui avait appris à manier l'un et l'autre avec "une grâce toute italienne", comme l'avait un jour souligné feue la Marquise de Ragny. Les vers de Monsieur étaient très beaux et montraient une charmante maîtrise de la langue française. Ils touchèrent Ragny et le dernier mot provoqua chez lui un petit rire suivi d'applaudissements chaleureux. Et le sourire qui illuminait son visage n'avait rien de factice. Depuis la mort de Valérie, il n'y avait que la danse, les vers, l'équitation et la débauche qui le pouvait faire sourire. Quoique la dernière n'eût jamais le mérite que de provoquer chez lui une moue de satisfaction, tout au plus.
Le geste de Monsieur surprirent fortement le jeune homme, une partie des gens assistant à la scène, et arracha un grognement fort peu discret et encore moins élégant de la part du Duc de Puylaurens. Le jeune noble eut un petit sourire intérieur à la réaction de l'ancien ami de son père, tandis que les lèvres du duc d'Orléans goûtait un peu les siennes. D'un geste, le Duc d'Orléans venait de le projeter sur le tout-devant de la scène, pour un court instant. Mais le bel oiseau savait que dans cette situation, tout faux pas s'avérerait fatal. Et il n'était pas question de tomber maintenant, alors que Puylaurens avait ses yeux bovins braqués sur lui. Le baiser en lui-même était fort agréable et L'Insaisissable en profita un peu. Il tourna un regard de provocation vers le duc frondeur qui serra le poing de rage. Qu'il enrage, si cela lui chantait, Sébastien de Ragny n'était pas du genre à céder à la colère d'un tel homme.
Quand le prince recula, bien que fort surpris par son baiser, Sébastien reprit assez vite contenance et répondit de sa voix suave et chaleureuse:

Votre réponse me touche, Monsieur, et je suis honoré d'avoir un maître qui sache aussi bien parler aux oiseaux, même les plus sombres. Et plaise à Dieu que jamais mes ailes noires ne fassent naître la moindre ombre qui vous déplairait de quelque manière que ce fût. Les ténèbres n'ont pas leur place auprès d'une étoile telle que vous.
Il accompagna sa phrase d'une élégante et gracieuse révérence et se releva en tournant le dos à l'homme qui le répugnait sans que cela paraisse volontaire.
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Un corbeau au service d'un paon ? (PV Monsieur) EmptyLun 14 Mai - 22:19

    La surprise, il aimait tant voir cette expression se lire sur les visages. Ses formes étaient si diverses, mais on la reconnaissait toujours, même si elle voulait se dissimuler par timidité, même si elle voulait se préserver par orgueil. Un sourire estomaqué, une grimace figée, un haussement de sourcil effaré, une main pudiquement placée devant les lèvres, un gémissement étouffé, une paralysie terrifiée... On pouvait presque parler de collection tant Philippe d'Orléans se délectait de voir l'espace d'un éclair ce qui échappait au contrôle de tout un chacun. C'était d'autant plus exquis lorsque le surpris était réputé pour son contrôle absolu, pour sa maîtrise presque parfaite de soi et sa volonté de ne jamais laisser transparaître ses sentiments. Monsieur pensait alors à Louis. C'était peut-être pour cela que Philippe était passé maître dans l'art de la surprise, il avait dû faire preuve de tant d'astuce et d'intelligence pour arracher un sourire à son souverain, une réaction autre qu'un regard impassible et auguste. Ne s'étant jamais contenté de son seul frère, Philippe avait appliqué cette politique à tous ceux qui l'approchaient de près comme de loin. Certes il en résultait des situations cocasses, parfois gênantes, plus rarement encore des situations où lui-même se sentait honteux et regrettait ses actes, mais finalement il ne pouvait s'en passer, et plus que jamais en ces temps où le frère du Roi avait un besoin impérieux d'oublier. Impérieux car nécessaire, impérieux car exigé.
    Le Duc d'Orléans avait donc guetté sur les visages cette surprise qu'il chérissait et il fut satisfait. Le grognement l'aurait fait rire s'il ne l'avait dégoûté, le regard d'Effiat était charmant, celui de son petit blondin fut croquant de jalousie. Et le regard ravissant de Sébastien, ce petit éclair délicieux après qu'ils aient séparés leurs lèvres, douces aux demeurant pensa Monsieur dans un sourire, Sébastien de Ragny était bien l'homme savoureux qu'il avait imaginé. Il était bien aussi le danseur expérimenté qu'il avait vu jusqu'à présent. Le Marquis s'était repris avec grâce, d'autres auraient balbutié, auraient rougi, ce que le frère du Roi eut trouvé charmant et drôle; d'autres encore, peut-être plus rares, auraient osé prolonger le baiser, ou du moins l'aurait rendu plus suave encore, plus langoureux, ce que Monsieur eût trouvé déplacé mais pas désagréable. Sébastien avait conservé une mesure toute galante. Philippe se surprit à le regretter un rien. Il fallait encore chasser, titiller l'animal. Monsieur ne doutait pas qu'il finirait par le débusquer hors de ses bosquets de peine et de pudeur affectée. Lui-même en était bien sorti... Bon fort bien, on l'en avait arraché, et il n'aimait pas cela. Mais en regardant autour de lui il devait bien se rendre à l'évidence que le monde continuait de tourner, avec ou sans lui. Cette pensée lui fut désagréable. Le monde continuait sa vie inébranlable sans lui, et lui continuait sa vie sans elle. Une évidence qu'il avait toujours rejetée et qui le giflait à l'instant pour cet aveuglement méprisant.
    Le sourire de Monsieur s'élargit alors qu'il croisait les bras, tenant son verre haut, et qu'il écoutait le ténébreux marquis lui répondre. Monsieur fut satisfait. S'il atteignait le coeur du jeune marquis par les mots alors la chose lui serait aisée. Il était doué avec les mots lui avait-on toujours dit. Louis écrasait par sa dignité, Monsieur par l'éloquence. Philippe d'Orléans était un homme vaniteux par excellence et il se targuait de cette vérité avec orgueil. Dans un révérence gracieuse le Corbeau d'Italie s'inclina et se dévoila derrière Sébastien le Duc à qui l'oiseau tournait le dos. Le sourire tendre devint un sourire mauvais et lutin. Monsieur but une gorgée de vin sans détacher ses yeux moqueurs de Puylaurens, qui devint rapidement rouge de honte ou de colère, gonflant son énorme cou à chacune de ses profondes inspirations, les pupilles roulant presque dans leurs orbites. Un crapaud pustuleux et bavant de jalousie. Enfin ce dernier point était ajouté par l'imagination débordante de Philippe; car malgré tout Puylaurens gardait un semblant de contrôle de soi face au Duc d'Orléans. Ce dernier n'avait jamais eu cette image de batracien à l'esprit, maintenant il n'arrivait plus à s'en défaire. Puylaurens était passé de bœuf à crapaud. Une belle déchéance, au moins le bœuf avait-il un semblant de dignité, le crapaud était... tout bonnement immonde. Cet échange n'avait duré que le temps de la révérence du Marquis, Monsieur pouffa en reportant son attention sur Sébastien. Que de transformation et de métamorphose, le conte se poursuivait.


    -Mais comme l'a dit notre bon petit baron... Les ténèbres ne sont là que pour agrandir mon éclat.

    Mordillant le bord de son verre, comme s'il se retenait d'une envie capricieuse, il s'était penché en avant pour murmurer d'un air taquin sa petite réponse. Monsieur se redressa tout sourire.


    -Voyons, l'on va encore dire que je bavasse comme 4 femmes réunies -ce qui n'est peut-être pas totalement faux, je le confesse-... Pourquoi vous ai-je fait mander?


    Le jeune blondin n'avait pu retenir un sourire amusé devant la perplexité de Monsieur, et il se redressa sur son fauteuil, intervint de sa voix douce comme les aimait le Duc d'Orléans.

    -Ragny ne peut vous répondre. Il ignore ne serait-ce que la nature de votre demande Monseigneur, vous ne l'avez pas encore exprimée.


    Le frère du Roi haussa un sourcil interrogateur. Ce n'était pas un jeu, l'esprit de Philippe avait abandonné depuis un long moment cette idée première qui avait amené Ragny près de lui. Ne voulant plus y donner suite, elle avait été éradiquée purement et simplement.

    -Vraiment?

    Il regarda le jeune garçon, indécis, cherchant un souvenir quelconque sur le visage du garçon. Ce dernier finit par articuler clairement et en silence le titre de ce conte de barbe bleutée. Le visage de Philippe s'éclaira.

    -Aaah oui! Bien entendu, c'était cela.

    Il se tourna en gloussant vers Sébastien.


    -"Ragny, mon doux Ragny ne vois-tu rien venir?"... Autre que le soleil qui poudroie et l'herbe qui verdoie bien évidemment. Voudriez-vous entrer de plein pied dans la source des contes mon bel oiseau, et amener dans notre triste réalité un peu de vérité de ces contes merveilleux? Car il se trouve que nos avons ici en nos murs des éléments fantastiques et fabuleux.

    Sur ces mots Monsieur battit légèrement des paupières dans un sourire, but une gorgée de son verre, la lueur noire de ses yeux brillants d'amusement.

    -Le Corbeau ira-t-il à la demande de son maître se battre contre l'horrible Barbe Bleue qui s'est perfidement glissé parmi les membres de cette illustre Cour? Monsieur de Puylaurens!
    appela Monsieur sans préambule, sans attendre la réponse de Sébastien, on me rapporte que vous allez de nouveau prendre femme!

    Il but innocemment dans son verre, le sourire mauvais aux lèvres comme toujours lorsque Son Altesse savourait à l'avance une pique qu'il allait lancer sans vergogne. Le Duc interpellé sentait déjà le danger, il dut néanmoins s'approcher et faire sa révérence, vague, proche de l'irrespect, teintée d'une méfiance palpable.


    -J'espère avoir cette fois le temps de rencontrer votre épouse, fit Monsieur dans un sourire mielleux.
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Un corbeau au service d'un paon ? (PV Monsieur) EmptyMer 25 Juil - 14:10

Même s'il le cachait bien, la surprise que le baiser de tantôt avait provoqué chez le beau marquis était toujours présente. Heureusement, personne ne l'avait remarqué, ou du moins le pensait-il. Bien qu'il lui tournât le dos, il pouvait toujours sentir le regard de Puylaurens glisser sur lui comme une limace. Encore aujourd'hui - particulièrement aujourd'hui, à vrai dire - , L'Insaisissable se demandait comment cet énergumène avait pu devenir un ami proche de son père. À part la Fronde, qu'avaient-ils jamais eu en commun ? Le Duc avait toujours dégoûté la Marquise de Ragny et son fils au plus haut point et il n’était toléré au château que du temps où Etienne était encore le maître. Depuis la mort de ce dernier, Puylaurens n’était plus le bienvenu chez les Ragny. Encore moins depuis la naissance d’Alexandra.
Les paroles de Monsieur le tirèrent de ses pensées déplaisantes et firent naître un sourire malicieux sur le magnifique visage du Gênois, bien que la question le laissa quelque peu perplexe. Mais le charmant jeune homme aux côtés du Duc d'Orléans répondit à sa place. À quel jeu jouait donc Philippe d'Orléans ? Ce n'était certes pas déplaisant, mais si le jeune marquis devait danser, il aurait aimé savoir sur quel pied. Surtout quand tous les regards étaient dirigés vers lui.
Apparemment, le jeu de Monsieur allait avoir pour but de faire danser le Duc de Puylaurens –qui, il fallait le dire, n’avait pas la maestria de Sébastien pour se sortir de ce genre de situation. Tous les regards convergèrent vers lui et le marquis le gratifia d’un sourire dont le venin était à peine dissimulé. Le bleu regard de L’Insaisissable croisa celui, un peu inquiet du Comte du Perche et celui, rassurant, de la belle Italienne. Tentant tant bien que mal de garder contenance, le duc répondit d’une voix un peu trop mielleuse en s’inclinant, respectueuse :

- En effet, votre Altesse. Je vais reprendre femme, car, comme vous le savez très certainement, feue mon épouse nous a quittés avant de pouvoir me donner un fils.
- Comme vos trois précédentes femmes, il me semble, votre Excellence ?
lâcha Sébastien en prenant nonchalamment un verre de vin sur le plateau d’un domestique.
Le vieil homme se tourna dans sa direction, lui jeta un regard noir à peine dissimulé, puis reporta son attention sur le frère du Roy. Il ne s’en était sûrement pas rendu compte, mais il était en fâcheuse position. Il suffirait d’un mot, un seul, pour que le piège se referme sur cet ignoble crapaud. La bête était aux abois, il ne manquait que quelqu’un sonne l’hallali pour que ce soit terminé.

- En effet. Et je prie pour que Mademoiselle de L’Aigle, ma promise, puisse me donner un héritier. Encore que je ne pense pas que cela soit réellement nécessaire, elle est jeune.
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Un corbeau au service d'un paon ? (PV Monsieur) EmptyMer 25 Juil - 14:54

    Voilà une situation comme il les aimait. Une chasse, une traque et bientôt l'instant fatidique de la curée. Tous se jetteraient sur ce dégoûtant Puylaurens. Tous attendaient un signe. Le sien plus particulièrement. Il était comme bien souvent, et comme à son habitude le maître du ballet de ce salon et Philippe savourait cette position. Le frère du Roi jeta un bref coup d’œil à Ragny alors qu'il appelait Puylaurens et que tous se tournaient vers lui. Et le sourire qu'il vit sur les lèvres du Génois le fit glousser. La chasse promettait d'être sans pitié. Excellent.
    Lascivement, Philippe d'Orléans croisa les bras, le verre haut, et releva ses yeux pour regarder dédaigneusement le Duc dans un léger sourire, écoutant sa réponse et gardant bien à l'esprit cette attitude proche de l'irrespect. Si Puylaurens voulait jouer avec lui, ce petit Duc de Province ne serait pas déçu du voyage. Monsieur savait toujours comment renvoyer la balle lorsqu'il s'agissait d’Étiquette et rares étaient ceux qui parvenaient à le battre sur ce terrain. Puylaurens n'avait rien d'une menace par ailleurs. Balourd, imbu de sa personne il mettait les pieds dans le plat tout seul. Il fallait avouer que Monsieur avait choisi là la facilité. Mais il s'ennuyait, il réfléchissait, et pour éviter que l'image d'un cadavre ne vienne le hanter, il devait s'occuper l'esprit au plus vite. Puylaurens avait été la solution d'urgence.
    Monsieur regardait donc cet homme écœurant, son sourire s'élargit lorsqu'il entendit la voix de Sébastien pointer ce qui faisait le cœur des conversations : ses trois précédentes épouses. Monsieur gloussa en voyant le regard furieux de Puylaurens. Etait-il stupide? Tout le monde savait qu'il avait au préalable épuisé trois autres femmes. C'était un secret de Polichinelle.
    Monsieur but dans son verre en gloussant, regarda Puylaurens. Il haussa un sourcil de surprise et se tourna vers son jeune blondinet en souriant.


    -De l'Aigle? Mon petit sucre vous m'aviez caché cela!


    Le jeune homme s'inclina.


    -Que Votre Altesse me pardonne, cela m'était sorti de l'esprit.


    Philippe d'Orléans rit doucement et se tourna vers Sébastien.


    -Ne serait-ce pas une de vos proches cousines mon cher ? Parbleu Puylaurens ! il est vrai que la demoiselle que vous vous apprêtez à épouser est de toute beauté.


    Monsieur s'avança et prit un verre sur un plateau, marcha d'un pas gracieux jusqu'à Puylaurens et le lui tendit dans un sourire.


    -Mais est-ce que cette beauté parviendra à réveiller en vous cette virilité qui semble vous faire défaut ?


    La voix, le regard du frère du Roi était d'une malice palpable, son sourire dégoulinait de politesse et d'amabilité cruelles, son port confiant et assuré lui donnait une dignité que la méfiance avait ôté au vieux Duc. D'un air innocent, son verre toujours offert en main, le Duc d'Orléans haussa les épaules.


    -Après tout, trois mariages, trois nuits de noces au moins... Et toujours aucun enfant, pas même de fille... Pensez-vous que les prendre au berceau vous donnera la force pour un héritier ?

    Les yeux brillants du Duc fixaient le visage de Puylaurens face à lui. Le signal était donné.
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Un corbeau au service d'un paon ? (PV Monsieur) EmptyMer 25 Juil - 20:43

Réalisant le nom de la malheureuse fiancée de Puylaurens, Sébastien peina à garder son calme. La belle Marie-Joséphine de L'Aigle était la fille de la cousine d'Etienne de Ragny, donc sa cousine au second degré. Ils s'appréciaient énormément et entretenaient une correspondance régulière. Pourtant, depuis quelques temps, ses lettres se faisaient moins fréquentes et moins longues. Le marquis comprenait enfin pourquoi. Par contre, il comprenait beaucoup moins les parents de la jeune fille. Avaient-ils jamais rencontré le Duc avant d'accepter sa demande ? Le jeune homme en doutait fortement. Au vu de l’amour que les seigneurs de L'Aigle portaient à leur fille, il devait y avoir eu un drame vraiment pour qu’ils consentent à vendre- il n’y avait pas d’autres mots- la pure et innocente Marie-Joséphine à ce monstre. Mais ce qui était le plus surprenant, c'était que le frère de la petite, François Philippe, n'ait pas protesté. Sébastien et lui étaient amis depuis de nombreuses années et le futur Marquis de L'Aigle, dont l’amour fraternel qu’il éprouvait envers sa sœur n’avait d’égal que son goût pour la débauche, lui avait toujours dit qu'il voulait que sa soeur fasse un mariage d'amour. Et avec le Duc de Puylaurens, c'était loin d'être gagné.
Mais il y avait un autre point de détail qui gênait énormément L'Insaisissable: par cette union, le Duc allait devenir son cousin. Rien que de penser à cela, il eut toutes les peines du monde à réprimer un frisson et une grimace de dégoût. Si le frisson passa totalement inaperçu, la légère moue qui remplaça la grimace quand Monsieur énonça son lien de parenté avec la pauvre fiancée de la "Barbe-Bleue", comme la Cour l'avait surnommé, ne fut discrète que pour ceux qui n'était pas tout près du bel Italien. Fort bien, il avait commis une erreur de trop. Comme le frère du Roy l'avait lui-même signalé tacitement, l'heure de terrasser la bête était arrivée. Et Sébastien n'allait vraiment pas se priver.

- Il y a une limite au pouvoir de la beauté. Et dans le cas de ce cher duc, il me semble, votre Altesse, que Vénus elle-même, si elle daignait même le regarder, ne pourrait rien faire pour lui... susurra le Génois en buvant une gorgée de vin d’un geste non dépourvu d’une certaine sensualité.
Puylaurens lui jeta un regard assassin qui ne dut pas échapper au reste de l’assistance. Comment un tel homme avait-il pu être admis où que ce soit, jusqu’à aujourd’hui ? Il ne savait apparemment pas se maîtriser, la preuve en avait été donnée quelques minutes auparavant.
Sébastien sourit, se mit à avancer parmi les courtisans de sa démarche féline, sembla examiner Puylaurens un instant, puis retourna auprès de Monsieur et continua d’un ton mi-sucré, mi-venimeux.

- Toutefois, n’oublions pas que Vénus fut elle-même mariée à Vulcain. J’espère juste pour vous, votre Excellence, que votre Vénus n’en sera pas une, car sinon, vous aurez un héritier sans y être pour grand’chose…
Le visage du Duc se crispa et il fit mine de s’approcher du jeune Corbeau avec clairement l’intention de le souffleter, mais se ravisa à temps. C’était parfait, la bête venait de sonner l’hallali d’elle-même.
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Un corbeau au service d'un paon ? (PV Monsieur) EmptyJeu 26 Juil - 17:30

    Que disait Aristote quant aux personnages de tragédies ? Ah oui. Qu'il fallait privilégier le drame dans les familles, le déchirement d'un père et d'un fils, par exemple. Faire couler le sang de son sang, la chair de sa chair.
    Certes ici ils n'avaient qu'un cousin et sa cousine contre un ancien ami, mais la chose s'en rapprochait. Il y aurait des histoires à conter avec cette famille-là. Avec toutes les familles rectifia Monsieur en son for intérieur. Il suffisait de trouver le secret de chacune d'entre elles et les drames se dévoilaient d'eux-mêmes.
    Philippe releva le regard en entendant une nouvelle fois la voix de Sébastien, et lui sourit. Il pouffa même et posa ses yeux noirs brillants sur Puylaurens qui restait là, sans défense aucune devant tant de prédateurs. Imbécile, se jeter tête la première... Une erreur qui ne pardonnait pas à la Cour.
    Ah le rapprochement avec Vénus était attendu, et à vrai dire si Sébastien n'avait pas lui-même évoqué Vulcain, Monsieur l'aurait fait de lui-même. Il ne fallait pas oublier des points aussi cruciaux dans la fable, cela laissait des échappatoires au gibier.


    -Comme vous êtes cruel mon bel oiseau,
    fit la voix mielleuse et souriante du Duc d'Orléans. Pourtant il n'y a que la vérité pour être aussi crue et véritable, n'est-ce pas Puylaurens ?

    Monsieur proposait toujours son verre au Duc, le tenant devant lui, attendant que celui-ci le saisisse. Il fallait rester poli, en toutes circonstances, plus encore il fallait conserver sa courtoisie. Et puis surtout, la cruauté était toujours plus douloureuse lorsqu'elle se drapait de gentillesse. Aussi lorsque le vieux Duc s'avança vers Sébastien dans l'intention visible de le frapper, le frère du Roi ne retira pas sa main, dissimula son sourire, laissa faire ce qui allait arriver.
    Il y eut un bruit de verre brisé, quelques cris surpris et surtout le regard du Duc de Puylaurens qui s'était écarquillé de stupeur, se poser tout d'abord sur son pourpoint sanglant de vin puis sur la main du frère du Roi qui observait lui-même le liquide pourpre glisser le long de ses doigts et de ses bagues.
    La plus grande majorité du vin avait été renversée sur Puylaurens, intentionnellement par ailleurs, mais tous fixaient la main de Son Altesse comme si toute l'horreur de la situation se trouvait sur cette main bijoutée et parfumée. Puylaurens ne parvenait pas à se détourner de cette main, ces doigts, ces bijoux. Il n'avait jamais remarqué que les doigts du Prince fussent aussi fins, aussi longs. Comme cette goutte de vin prenait son temps, comme elle glissait lentement, fatalement. Enfin elle quitta ce doigt, vola, avant de s'écraser et de s'étaler en gouttelettes sur la dentelle blanche qui recouvrait le torse du Prince.
    Tout cela n'avait duré que quelque secondes. Quelques secondes à peine.
    Les lèvres de Philippe d'Orléans s’entrouvrirent de stupeur scandalisée, ses yeux s'écarquillèrent dans un mouvement calculé alors qu'il avait vu ce fatal attentat.


    -Ah non ! Non non NON ! Mais quel maladroit vous faites ! Voilà mon costume ruiné !


    Il agita ses doigts fébrilement pour faire partir le vin qui, sous cette action s'envolait en petites gouttelettes rouges et s'écrasaient alternativement sur le visage ou l'habit de Puylaurens. Et le frère du Roi de dire furieusement en retirant son jabot souillé :

    - Monsieur le Duc ! Ce n'est pas un surplus de vin qui poussera votre promise dans vos bras ou qui que ce soit d'autre ! Ah mon habit ! Et votre propre tenue !? Vous n'êtes pas même capable de saisir un verre, comment pourriez-vous vous charger correctement de votre épouse et avoir un héritier !? Vous besogneriez dans une jarre que vous ne le réaliseriez pas ! Je vous donne le bonsoir Monsieur, disparaissez avant que vous ne commettiez un autre crime sous mes yeux.

    Il jeta au visage de Puylaurens sa dentelle autrefois immaculée d'un geste courroucé.


    -Essuyez-vous au moins le visage que vous puissiez retrouver votre chemin. Mon costume,
    gémit-il en se détournant du vieux Duc, je vais devoir me changer intégralement.


Dernière édition par Monsieur le Jeu 26 Juil - 19:49, édité 1 fois
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Un corbeau au service d'un paon ? (PV Monsieur) EmptyJeu 26 Juil - 19:45

Le beau Marquis de Ragny, son sourire venimeux toujours accroché aux lèvres, ne lâchait pas Puylaurens du regard. Et il se délecta de la décomposition de son visage, tandis que le vin coulait le long de la main de Monsieur. Oui, Sébastien pouvait se montrer extrêmement cruel, surtout quand il s'agissait d'un homme tel que Puylaurens. D'ailleurs, il avait décidé d'envoyer une lettre aux parents de Marie-Joséphine pour leur raconter tout ce qu'il savait sur le Duc et leur suggérer de reconsidérer leur décision de marier leur petite fée à ce vilain crapaud. Il aimait trop sa cousine pour laisser un homme aussi abject poser ne serait-ce qu'un doigt sur elle. Comme il ne laisserait un être aussi répugnant toucher un cheveu d'Alexandra.
Tous les courtisans semblaient retenir leur souffle pendant les quelques secondes que dura le parcours de la goutte de vin sur la main et quand ils purent reprendre leur souffle, ce fut pour voir Puylaurens perdre les couleurs que lui avaient données les piques de L'Insaisissable. Ce dernier feignait la même surprise outrée que ceux qui l'entouraient, mais ceux qui le connaissaient bien ou qui savaient extrêmement bien déchiffrer les expressions se rendirent compte de la joie cruelle que provoquait chez lui l'accident. Comme Effiat et les autres amis du Duc d'Orléans, il contemplait les taches qui ornaient dorénavant l'habit impeccable du Prince. Ce dernier, visiblement scandalisé au dernier degré ou peu s'en fallait, cracha presque à la tête du vilain crapaud une telle tirade d'atrocités que le jeune marquis en fut presque choqué. Mais le Bourguignon se régalait de la perte de couleur du vieil ami de son père. Il avait souhaité cette humiliation tacitement et il n'était vraiment pas déçu. Le frère du Roy retira son jabot souillé et le lança à la figure de l'importun, lui portant ainsi le coup de grâce. Le Sombre Marquis continuait de boire à son verre, gorgée par gorgée, jetant de temps à autres des regards un peu enjôleurs aux jeunes gens présents autour de lui, excepté à Puylaurens. C'était tout bonnement au-dessus de ses forces.
Mais heureusement pour lui, l'humiliation que venait de subir le vieux Duc avait été suffisante pour qu'il parte sans demander son reste, sous les rires des courtisans. Parfait, on ne le reverrait pas de sitôt. Et il veillerait à ce que l'alliance de sa famille avec ce porc ignoble ne se fasse pas. Qu'il aille chercher ailleurs !
Le Sombre Marquis posa son verre d'un geste nonchalant et retourna vers Monsieur de sa démarche féline. Un instant son regard se posa sur son cher Hector qui lui souriait avec un petit air de reproche. Mais le Génois savait que ce reproche n'était là que pour la forme et que son ami ne lui en voulait pas réellement. Il était vrai qu'il jouait constamment avec le feu, même s'il ne s'était jamais brûlé jusqu'à présent. Et cette silencieuse réprimande n'était là que pour lui rappeler de se montrer prudent. Et tomberait certainement, comme toujours, dans l'oreille d'un sourd.

-Votre Altesse, souhaitez-vous que je vous accompagne jusqu'à vos appartements pour que vous puissiez vous y changer ? s'enquit le jeune Gentilhomme de la Chambre de Monsieur, sur un ton des plus respectueux, mais où pointait une très légère once de sensualité.
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Un corbeau au service d'un paon ? (PV Monsieur) EmptyJeu 26 Juil - 23:21

    Monsieur avait regardé Puylaurens du coin de l’œil, juste pour voir, pour constater, puis il s'était totalement désintéressé de lui et continuait de se lamenter sur son costume détruit, ruiné, inutilisable et tout sauf présentable. A vrai dire les taches n'étaient pas plus grandes qu'un pépin de raisin, et il fallait vraiment connaître cette petite aventure pour porter attention aux gouttes rubis qui se mêlaient parmi les véritables pierres.

    -Regardez cela, regardez ! Je ne peux plus rester ainsi devant vous. Moi qui aimait tant cette dentelle de Venise et je l'ai jeté à cet homme... J'ai donné de la dentelle à un cochon.


    Monsieur continua encore de se lamenter pour la forme, tout en regardant autour de lui les sourires et les rires qui se levaient alors qu'il continuait d'achever celui qui les avaient déjà quittés la queue entre les jambes. D'autres se lamentaient avec lui et tentaient de le consoler.

    -Jamais plus je ne pourrai porter une telle chose, jamais... Dénaturé, défiguré. Et le souvenir, le souvenir ne pourrait être toléré, il me retiendra de remettre ce même genre de toilette.

    Philippe d'Orléans aurait pu continuer de gémir et de se plaindre des heures durant si Sébastien de Ragny n'était pas intervenu de sa voix douce et ma foi fort agréable, pensa le frère du Roi. Il tourna le regard vers lui comme s'il était son sauveur, les yeux pétillants de malice.


    -Oh oui, oui venez avec moi.


    Le frère du Roi se retourna dans une pirouette de violet et de pourpre.


    -Je vous abandonne mes amis, mais pour un temps seulement je vous reviendrai bientôt... A moins que le Corbeau ne m'ait enlevé vers d'autre horizons.


    En disant cela il avait tourné la tête vers Sébastien, lui avait fait un sourire aussi sensuel que l'avait été la voix du marquis auparavant. Le frère du Roi fit un petit geste d'adieu de sa main bijoutée et quitta la galerie où ils s'étaient trouvés jusqu'à présent.
    Les couloirs étaient d'un silence horrible après être restés aussi longtemps dans la galerie. Pour certains cela devait être un apaisement, pour le frère du Roi cela lui rappelait le silence qui s'était installé dans son esprit après que sa mère...
    En tournant les yeux vers Sébastien, il eut le sentiment de voir sa silhouette là, à cette fenêtre qu'elle aimait tant. Monsieur pinça les lèvres et tourna la tête et le sourire vers Sébastien


    -L'expression de Puylaurens vous a-t-elle satisfait mon bel oiseau ? Je compte sur vous pour que ce mariage soit... Compromis. J'ai bien peur que la bête ne se transforme pas au baiser de la belle mon cher.

    Tout en marchant vers ses appartements, Philippe observait avec attention celui qu'il s'était plu à appeler le Sombre marquis. Que ferait-il maintenant qu'ils en étaient là?
Monsieur
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Un corbeau au service d'un paon ? (PV Monsieur) EmptyVen 27 Juil - 1:19

S'étant incliné avec élégance et respect, le jeune Marquis de Ragny sourit au frère du Roi, se lamentant toujours sur son habit perdu. À y bien regarder, ce n'était pas bien grave, mais Sébastien avait obtenu ce qu'il désirait: l'humiliation de Puylaurens. Et le regard que ce porc lui avait lancé avait été si délicieusement assassin et venimeux que le Sombre Marquis en avait réprimé un éclat de rire. Le venin n'était pas une arme que ce muffle maîtrisait, ou du moins pas aussi bien que Sébastien. D'ici peu, toute la Cour ne parlerait plus que de cet incident, au moins jusqu'au prochain scandale. Et le beau jeune noble bourguignon s'arrangerait pour ses cousins normands aient vent de cette affaire et de toutes les autres dont il avait connaissance concernant Puylaurens. Il ferait tout ce qui était en son pouvoir pour que le mariage n'ait pas lieu.
Prenant congé pour un moment de ses amis d'un geste gracieux accompagné d'un magnifique sourire, Ragny emboîta le pas de Monsieur, non sans jeter un regard à Hector d'Alençon qui ne l'avait lâché des yeux de toute l'affaire. Il lui accorda un sourire presque angélique et sortit de la pièce.
Tout en marchant légèrement en retrait de Monsieur, le jeune homme ne put s'empêcher de le détailler du regard: ses yeux noirs et pétillants comme un soir d'été, ses cheveux bouclés et soyeux, sa peau dont la blancheur faisait passer une Madone pour une paysanne de bas étage, sa démarche féminine, son raffinement en matière d'habillement, tout cela faisait de Philippe d'Orléans un homme des plus agréables à regarder, même si Sébastien avait plus un faible pur les hommes un peu plus masculins. Certes, ceux qui voyaient Celestino Dioli, pouvaient douter de cet état de fait, mais le jeune marquis aurait répondu que ce n'était pas comparable. Celestino était son ami d'enfance et c'était lui qui l'avait initié aux plaisirs du vice italien. Et il avait toujours été très rassurant, réconfortant.
La voix du frère du Roi le tira de ses pensées plus qu'agréables. Toujours souriant, comme à son habitude, le noiraud aux yeux céruléens répondit d'une voix suave sans être mielleuse:

- Très satisfait, monseigneur. Vous pouvez compter sur moi. Tant que j'aurai mon mot à dire, ce mariage sera compromis. Un corbeau, aussi noir soit-il , ne peut décemment pas laisser une belle colombe être ainsi souillée par un hideux crapaud.
La démarche ne serait certainement pas facile, car, après tout, le Duc était riche, avait des titres et des domaines. Mais Séb' connaissait les parents de la jeune fille et son bonheur leur importait énormément. Si le marquis parvenait à les convaincre de l'ignominie de Puylaurens, ils annuleraient cet odieux hymen et ce, malgré les risques de scandale.
L'insaisissable plongea son bleu regard dans celui de Philippe, lui sourit et demanda d'une voix douce:

- Comment vous remercier ?
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Un corbeau au service d'un paon ? (PV Monsieur) EmptyDim 2 Sep - 1:45

    Comment dire... Monsieur était particulièrement fier de son coup, pour parler familièrement. Si fier, que l'ombre maternelle qu'il avait cru apercevoir n'était déjà plus dans son esprit. Le Frère du Roi faisait un pas après l'autre comme s'il sautillait d'une joie carnassière et sanglante, repu d'un appétit féroce qu'il avait enfin assouvi après tant de jours d'exil funeste. Monsieur détestait la chasse, la poursuite, la peur de la bête acculée face aux chiens écumant de rage, suivis par leurs maîtres tout aussi bestiaux et assoiffés de sang que leurs limiers ; il haïssait la mise à mort sanglante des animaux qui ne demandaient rien d'autre que de vivre en paix, d'échapper à la fureur des hommes. Monsieur était écœuré par la chasse à courre.
    En revanche, la chasse de Cour...
    On le voyait bien à sa démarche, Monsieur était définitivement un prédateur,un gourmet traquant à la première occasion les courtisans plus petits que lui, les mettant à mort lorsqu'il en avait le loisir, ou leur faisant grâce lorsqu'il en avait la fantaisie. Et heureusement pour lui, ils étaient nombreux, très nombreux. Il ne risquait pas d'épuiser le troupeau. Bien au contraire. Monsieur faisait office de sélection naturelle.
    Il fallait avouer que parfois le gros poisson qu'était Monsieur se trouvait mordu par les plus petits. Bien plus souvent qu'à son tour, bien plus souvent qu'on ne pourrait le penser et que Monsieur se plaisait à se le rappeler. Combien de piques avait-il déjà bravé dans sa vie ? De nombreuses, qu'il essuyait avec un sourire et une phrase en retour. Rare tombait l'humiliation et celle-ci venait le plus souvent d'en haut, venait du poisson suprême, de son frère. Une humiliation légitime donc et que Philippe acceptait de bonne grâce. Mais en réalité Louis n'était pas le seul, les favoris du Duc d'Orléans avaient dans une moindre mesure créé une réputation ferme et définitive au frère du Roi : Monsieur n'était jamais maître de lui-même, il était au service de ses petits sucres, de ses petits chéris, il était la marionnette de Lorraine plus particulièrement.
    Mais qu'importe, car jusqu'à présent Monsieur avait vécu heureux dans cet état de fait, et il faisait d'autres heureux alors que demander de plus ? Il avait un jeune fils, une belle jeune fille, il faudrait peut-être simplement un ou deux enfants de plus pour être certain de perpétuer la dynastie.
    En pensant à la manière dont il devait s'y prendre, en pensant à Henriette, son corps se révulsa imperceptiblement. Les yeux de Sébastien le sauvèrent du naufrage de dégoût dans lequel il s'était aventuré, il fut aussitôt soulagé, sourit en hochant la tête, gloussa légèrement en entendant le jeune homme l'approuver.


    - Crapaud qui peut pourtant avoir la langue bien longue à l'instar du bras mon bel oiseau. J'espère que vous guiderez cette colombe dans les nues... Peut-être même lui offrirez-vous un mari à sa hauteur, un nid parfait, et que vos futurs enfants auront un plumage de noir et de blanc mêlé.


    Taquinerie d'enfant. Monsieur savait parfaitement que Sébastien ne pensait absolument pas à se marier avec sa jeune cousine et il en souriait dans une innocence pervertie et espiègle.
    Philippe laissa le Sombre Marquis croiser son regard, plonger dans ses yeux noirs, brillants de larmes moqueuses, amusées, fruit de cette soirée mais aussi de cette si longue souffrance dont il avait tant de mal à se débarrasser. Un brillant sourire vint illuminer son visage, éclairé par les lumières des candélabres qui les entouraient.


    -Me remercier ? Voyons Marquis vous m'avez offert ce soir ce que je vous avais demandé... Un chevalier contre cet ogre, le sublime de l'affrontement. Et vous devriez me remercier, minauda le Duc d'Orléans. L'inverse serait plus approprié.

    Il s'arrêta pour mieux le regarder. Il ne s'en lassait pas, pas encore, et ce depuis plus d'un an déjà.


    -Mais je devine que vous allez insister, porteur de nuit. Alors soit.


    Monsieur sourit avant de caresser la joue de Sébastien, du bout de ses doigts de pierre et d'or. Comme il aimait toucher la peau d'autrui.


    -Restez mon vassal joli corbeau, cela sera largement suffisant. Ah... Et si vous pouviez avoir la bonté de me trouver une tenue, sans vouloir vous paraître désobligeant, vous seriez un ange et vous m'auriez entièrement remercié...


    Des joues il était passé aux lèvres, souriant encore.


    -Ou presque... Me conduisez-vous à mes appartements ?
    dit-il nonchalamment en retirant sa main. Je suis encore souillé de ce vin et je souffre cela avec difficulté...
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Un corbeau au service d'un paon ? (PV Monsieur) EmptyMar 22 Oct - 16:11

[HRP: *se met à genoux pour implorer le pardon de Monsieur pour le temps qu'elle a mis à répondre*]

Jubilant toujours intérieurement de l'humiliation de son ennemi, Sébastien ne pouvait s'empêcher de sourire. Il haïssait Puylaurens. Depuis leur première rencontre bien des années auparavant. Les amis des proches ne sont pas toujours nos amis, contrairement à l'adage populaire. Mais il s'était toujours efforcé de se montrer respectueux envers le Duc, malgré le mépris qu'il lui inspirait. Du moins, jusqu'à aujourd'hui. Cet homme ne devait pas épouser Marie-Joséphine, c'était impensable.
Il se souvenait de la première fois qu'il avait rencontré la jeune Demoiselle de L'Aigle. Si sa mémoire ne lui faisait pas défaut, cet événement avait eu lieu dès son premier retour de Gènes. Etienne de Ragny avait invité une bonne partie de leur famille pour célébrer sa libération et le retour de sa femme et de ses enfants. Sébastien avait seize ans, Marie-Joséphine en avait dix. Malgré leur différence d'âge, les deux jeunes gens avaient vite sympathisé et, à leur séparation, avaient commencé une correspondance soutenue et riche. Même quand le futur marquis était reparti pour Gènes, les lettres ne s'étaient pas arrêtées. Sébastien avait même eu vent d'une rumeur qui courait dans sa famille, prétendant qu'ils désiraient se marier en secret. Mais le mariage de Ragny avec la belle Valérie de Mâcon avait bien vite fait taire ces commérages. Marie-Joséphine de L'Aigle avait d'ailleurs assisté à la cérémonie en compagnie de son frère et avait félicité les mariés avec beaucoup de bonheur. À présent que sa bienaimée cousine se trouvait empêtrée dans de si viles fiançailles, Sébastien ne pouvait pas rester les bras croisés. Et il n'était pas homme à craindre de se battre pour ce qu'il savait juste.
- Crapaud qui peut pourtant avoir la langue bien longue à l'instar du bras mon bel oiseau. J'espère que vous guiderez cette colombe dans les nues... Peut-être même lui offrirez-vous un mari à sa hauteur, un nid parfait, et que vos futurs enfants auront un plumage de noir et de blanc mêlé.

- L'idée en a été évoquée, quelques temps avant que je me fiance à Valérie – que Dieu ait son âme. Mais je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour lui éviter un mariage aussi pénible que celui auquel on la voue aujourd'hui.
Bien que l'idée d'épouser sa cousine au second degré revienne de manière quasi-systématique dans les lettres de sa mère et que cette perspective soit loin d'être rebutante, il était beaucoup trop tôt pour que Sébastien pense à se remarier. La blessure de la perte de son épouse était loin d'être complètement cicatrisée et restait insupportablement douloureuse, malgré toutes les ruses dont le Sombre Marquis avait usé pour s'en distraire.
Il sourit quand le frère du Roy le compara à un chevalier. Ragny n'avait fait qu'agacer la bête de ses piques venimeuses. La mise à mort était revenue au Duc d'Orléans et à personne d'autre. Mais avant qu'il ait le temps de répliquer, l'Insaisissable sentit les doigts de son interlocuteur sur sa joue et réprima un frisson. Le contact était agréable et le marquis aimait beaucoup la tournure que prenait le jeu. Car il savait que ce n'était là qu'un jeu, une distraction de plus. Une façon pour lui de faire taire la douleur, au moins pour quelques heures. Donc, quand Monsieur se mit à caresser ses lèvres, le jeune homme les entrouvrit légèrement et déposa un furtif baiser sur le bout des doigts offerts, espérant juste ne pas s'être montré trop audacieux.

Tant que vous ne me renvoyez pas, je resterai votre vassal, Monsieur. Je vais faire de mon mieux pour vous aider à trouver une tenue qui fera oublier le désastre advenu à cause de Puylaurens.
Rien ne saurait souiller une étoile telle que vous, votre Altesse. Mais si vous le désirez, je vous accompagnerai où que vous me le demandiez.
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Un corbeau au service d'un paon ? (PV Monsieur) EmptyMer 23 Oct - 19:18

    Il aimait toucher la peau de ses petits adorés, les caresser et les taquiner avec douceur. Il aimait exercer son toucher et leur patience, explorer les sens et même en abuser.
    Dieu les avaient pourvu de corps et de sens, c'était bien pour en faire usage, d'une manière ou d'une autre, cela il l'avait appris de longues années auparavant sur les genoux d'un homme au parfum de frangipane.
    S'il était un pourceau d’Épicure, Monsieur s'en contentait fort bien. Sa mère avait vaguement tenté de calmer ses ardeurs mais comme pour Louis son combat fut vain. On ne pouvait pas dire non plus que Anne d'Autriche ait véritablement insisté pour ce qui était de l'attitude de son fils cadet. C'était elle qui l'avait consciemment dirigé dans cette attitude, dans ce train de vie. Elle en avait été consciente, parfois l'avait très succinctement regretté. Puis elle se souvenait d'un sifflement insupportable, d'un parfum qui lui était devenu difficilement tolérable et le sourire de Gaston d'Orléans réapparaissait devant ses yeux fatigués. Alors elle ne regrettait rien et regardait son fils cadet dans un sourire. Il avait hérité du sourire de Gaston et par bien des manières il lui ressemblait. Gaston avait transmis à son royal neveu son goût pour les arts et les gemmes, son goût pour l'architecture, cette attitude affectée et mieleuse, sa pensée sceptique et son aspiration hédoniste.
    Mais heureusement, et Anne y avait jalousement veillé, il n'avait pas hérité de cet esprit malade, cette passion pour le pouvoir, cette soif de puissance qui avait rongé Gaston d'Orléans toute sa vie durant. Il n'y avait pas eu pire frère que cet homme là, plus mauvais comploteur aussi. Seul le sang de la France qui coulait dans ses veines lui épargnait l'échafaud qui avait de si nombreuses fois accueilli ses infortunés complices, emportant avec eux les espoirs naïfs d'un homme au parfum de frangipane.
    Mais Monsieur était bien loin, bien bien loin de cet esprit là qui ne l'avait jamais effleuré.
    Il effleurait d'autres choses à la place. Le corps de Ragny par exemple.

    Philippe sourit en l'entendant. La jolie Marie-Joséphine de l'Aigle, oui. Il l'avait déjà vu et reconnaissait la beauté de la jeune femme.


    -Voilà qui est parfait, votre maître oiseau se sent immensément soulagé Marquis.


    Philippe lui souriait gracieusement, sans aucune inquiétude pour sa gorge mise à nue depuis le moment où il avait dédaigneusement jeté son jabot au visage de Puylaurens dans un geste qu'il estimait être parfaitement théâtral. Floridor lui-même ne l'aurait pas nié.
    Il sourit à son petit baiser, laissa sa main glisser sur le cou du sombre oiseau qui lui était encore enferré de blanche dentelle, effleura son torse, ses yeux suivant la course de ses doigts.
    Il le regardait avec cette espièglerie endormie depuis la mort de sa mère, il le regardait avec un certain délice. Tous deux connaissaient les règles du jeu, tous deux le jouait par ailleurs avec beaucoup d'aisance et de volupté.


    - Mes appartements suffiront pour cette fois,
    murmura-t-il dans un sourire. Et selon la tenue que vous m'y trouverez... je vous renverrai ou non.

    Il laissa sa main glisser sur sa poitrine et plus bas, se retira avant d'avoir atteint sa ceinture, le regardant de ses yeux noirs malicieux et qui retrouvaient lentement la vie.


    -Guidez-moi Corbeau.


    Son sourire avait été un souffle, son souffle avait été joueur. Il attendait que s'exécute le jeune Marquis.
Monsieur
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Un corbeau au service d'un paon ? (PV Monsieur) EmptyMar 18 Fév - 11:15

Ragny connaissait très bien sa place dans le grand jeu de Cour et, heureusement pour lui, il était un joueur assez habile. Il n'avait pas le choix. Son grand-père, François de la Magdelaine, avait été l'un des serviteurs les plus fidèles du roi Henry IV et avait été fait marquis de Ragny pour cette fidélité. Parmi les commentaires que Sébastien avait entendus sur lui, le jour où il était arrivé à la Cour, celui qui avait particulièrement retenu son attention, quoiqu'il n'en ait rien montré, avait été : « Petit-fils d'un Ragny fidèle, fils d'un Ragny frondeur, que nous réserve ce Ragny-là ? ». Si Etienne de Ragny avait choisi de déshonorer l'héritage familial, maintenant qu'il était mort, c'était à son fils unique de redorer leur blason. Sa charge de Gentilhomme de la Chambre de Monsieur était un pas dans cette direction, mais il n'oubliait pas que c'était une arme à double tranchant. Sa mère, bien meilleure courtisane que ne l'était son père lui avait enseigné les règles du jeu de Cour et il s'était montré un élève attentif et appliqué. Ses travaux pratiques, c'était à Gênes qu'il les avait passés. Avec brio, il fallait bien le dire. Dans la Superbe, il avait très vite brillé au-delà du prestige du nom de sa mère et il s'était fait presque autant d'amis que d'ennemis. En France, c'était plus difficile, car si le nom des Durazzo lui avait ouvert plusieurs portes à Gênes, celui de Ragny attiraient sur lui les regards suspicieux de certains et les regards impatients d'autres. Impatients de le voir commettre la plus petite erreur.
Son regard était plongé dans celui du prince tandis qu'il frissonnait légèrement sous les effleurements. Il sourit au frère du Roy d'un air un peu candide et acquiesça. Le jeu était délicieux et promettait d'être riche en surprises.

"Je vais faire mon possible pour vous contenter, votre Altesse. Encore que je n'aie pas votre oeil aiguisé pour la mode et que le deuil que je porte depuis bien des mois m'aie peut-être trop habitué au noir, je veillerai à vous trouver une tenue qui vous conviendra. Ou du moins, je l'espère. Mais avant cela, je vous raccompagne à vos appartements, bien entendu."
Il sourit et recommença à marcher d'un pas lent et félin. Il savait bien que Monsieur n'avait besoin de nulle aide pour regagner ses appartements, mais la tâche ne pesait absolument pas à Sébastien. Il aimait beaucoup discuter avec le frère du souverain et jouer ce petit jeu qu'ils avaient commencé ce soir-là. Mais le fait de devoir trouver une tenue pour le Duc d'Orléans lui semblait une tâche ardue. Depuis environ un an, le marquis ne s'était pas vraiment soucié de la mode, reclus qu'il avait été dans son château à pleurer sa défunte épouse. Et puis, son oeil n'avait jamais été très exercé pour ce genre choses. Il aimait certes les beaux vêtements, mais la mode italienne n'avait pas grand-chose à voir avec la française.
Il finit par chasser ses inquiétudes. Il trouverait bien quelque chose.
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