Côte à côte, les deux jeunes femmes se promenaient dans le jardin du Boulingrin. Juliette et son amie avaient, en effet, eu l'agréable idée de venir se promener en ce lieu magique et pourvu de verdures de toutes parts. Juliette aimait la nature et tout ce qu'elle pouvait contenir, ce qui n'était pas forcément l'avis de sa jeune amie qui sursautait à la seule vue d'un pigeon passant par là. Juliette, elle, souriait aimablement ne voulant en aucun cas offenser son amie par un rire moqueur. Elle n'était pas si vicieuse ni méchante. Cela faisait une heure que les jeunes femmes se promenaient et Juliette avait réussi à éviter avec aisance le sujet de son fiancé. Elle n'aimait certes pas mentir à ses proches mais elle n'avait absolument aucune envie de mentir au sujet de son fiancé … Alors, elle avait simplement nuancé ses propos. Elle n'avait pas eu de ses nouvelles depuis une semaine et Juliette s'en portait tout aussi bien. A la simple vu de son affreux visage, la jeune femme sentait la peur et la colère envahir chaque fibre de son corps. Elle n'avait jamais ressentie la haine ni la colère auparavant. Peut-être de vagues agacements mais ça c'était toujours arrêté là. A présent, en dehors du couvent où elle avait passé toute son enfance, la jeune femme avait bien vite découvert que sa vie n'allait pas être de tout repos …
Sortie de ses pensées par la main que son amie posa sur son épaule, Juliette sortit de ses sombres songes.
-Je me dois d'y aller, ma chère amie. Malheureusement, un repas avec quelques amis de mon mari est prévu dans quelques heures. Je me dois d'être prête, dit-elle puis reprenant après un sourire, tu ne m'en voudras pas de t'abandonner ainsi ?
Juliette prit la main gantée de son amie et secoua doucement la tête.
-Ne t'en fait donc pas ! Mon carrosse m'attend devant le jardin et puis, j'ai bien envie de marcher encore un peu.
Sa jeune amie acquiesça sans un mot et lui dit au revoir. Sur ces mots, Juliette reprit son chemin. Le jardin était visité par un grand nombre de personnes ce jour-là mais cela ne dérangea point Juliette, qui partit vers un petit bosquet qui menait à un lieu où peu de mondes s'aventuraient. Rassemblant ses jupes de couleur mauve, elle s'avança jusqu'à une grande fontaine.
Ses yeux parcoururent les lieux et elle ne compta qu'un jeune couple assis sur un banc. heureuse de pouvoir profiter du calme environnant, la jeune femme s'avança vers le rebord de la fontaine et s'y assit. Peut-être était-ce mal élevé pour une demoiselle de s'asseoir si près de l'eau mais Juliette n'en avait que faire. Elle plongea même sa main dans l'eau limpide de la fontaine, sentant sa douce froideur sur sa main pâle.
Voilà longtemps qu'elle n'avait pas eu droit à un moment de solitude comme celui-ci. Elle ne profitait jamais d'être seule. Soit car sa tête était bien trop chargée de problème, soit parce qu'elle n'était tout simplement jamais seule. Les bals auxquels elle était invitée ou les après-midi avec ses amies lui paraissaient long et fortement ennuyeux. Pas qu'elle n'apprécie pas la compagnie de ses amies mais … Juliette se sentait tellement détachée de tout cela à présent. L'acte violent dont elle avait été victime l'avait changé, elle le savait. Une chance qu'elle ne soit pas tombée enceinte mais à part ça, elle n'avait tout simplement plus rien d'une vierge. Elle n'avait peut-être plus aucune chance de se marier un jour … Si ce n'était avec ce monstre mais de ça, il en était hors de question. Elle se le promettait, elle ne pouvait tout simplement pas accepter qu'un homme tel que lui l'épouse et partage à nouveau sa couche de force … Elle ne le permettrait pas.